LES PICTOGRAMMES DE CORNUSSE

Françoise GICQUIAUD                            Orthophoniste

       Route de Saint Amand 18350 Nérondes

tél, fax : 02 48 74 84 30 E mail : mgicquia@club-internet.fr

http://www.auteurs-editeurs.com/

 

DES IMAGES POUR RACONTER

 

C'est au cours de vingt ans de travail d'orthophonie à CORNUSSE, auprès d'enfants et d'adolescents Infirmes Moteurs d'Origine Cérébrale sans langage articulé, sans langage écrit, et souvent sans possibilités gestuelles de désignation valable, que j'ai élaboré environ 8OO pictogrammes et petites images pour communiquer.

Ils ont été dessinés avec les enfants au fur et à mesure de leurs besoins et en tenant compte de leurs gestes et mimiques. Leur création correspond à une adaptation à une population plus atteinte au niveau de l'abstraction que celle qui utilise couramment des symboles élaborés. Cela n'empêche pas certaines similitudes, et des mixages, en particulier pour les enfants venant d'un autre Centre et ayant intégré d'autres apprentissages.

 

Caractéristiques des images de CORNUSSE

 

Elles se placent à la suite des photos ou représentations des membres de la famille, de la maison, des objets familiers, des personnes qui s'occupent de l'enfant au Centre.

Elles sont figuratives, d'apprentissage facile, souvent directement évocatrices.

Elles demandent peu d'associations. Par exemple, les verbes avoir et être ne s'y trouvent pas isolés mais font corps avec un autre mot : "avoir faim," "avoir froid", "avoir sommeil" (tableau 02),"je suis triste" (tableau 04). Le verbe faire n'existe isolé que pour dire "faire quelque chose", c'est-à-dire "travailler ou jouer"   (tableau 19),   sinon   il   fait   corps    avec     son complément : "faire le lit", "faire le ménage", "se faire bronzer" (tableau 16). Le verbe aller, soit une flèche de gauche à droite (tableau 18) est le plus souvent associé aussi à son complément : "aller en fauteuil", "aller en voiture (tableau 14). Les verbes d'action sont représentés par un personnage en mouvement : "s'habiller", "se déshabiller", "se débarbouiller" (tableau 13), "pousser", "accompagner", "se promener", "sauter" (tableau 18), par des mains : "prendre", "lâcher" (tableau 18), "faire la cuisine" (tableau 16), "recevoir du courrier (tableau 14), ou par des flèches : "avancer", "reculer", "tomber" (tableau 18).

2


Ceci a pour but de donner le plus simplement possible la notion de verbe, par rapport aux substantifs, seuls éléments en général des premiers messages. Le peu d'associations favorise la rapidité, l'économie de déplacement dans les planches d'images. Certaines illustrations sont directement inspirées des gestes, mimiques, regards des enfants en situation de communication pour insister sur une idée précise. Ainsi, "en avoir marre de toi", une main par dessus la tête, l'autre pointée vers l'interlocuteur (tableau 04); "grave" est une personne allongée sur le sol qui perd son sang. Un regard consterné de l'enfant vers le sol a induit cette représentation (tableau 02). Une seule image peut signifier toute une expression, une phrase : "je voudrais téléphoner", "est-ce mon heure de rééducation ?" (tableau 04). Des évocations nécessitent un raisonnement induit par une flèche ; il faut à ce moment tenir compte de l'orientation de la flèche, et du sens gauche-droite des éléments : "grossir", "maigrir" (tableau 11). Il est nécessaire de raisonner par antithèse pour comprendre que la croix de la négation sur "Classe" ou sur "Centre" signifie "vacances". (tableaux 07 et 08). Cette même croix sur "grossir", veut dire "ne pas grossir" (tableau 11) et évoque le régime nécessaire à certains pensionnaires trop gourmands. La croix de la négation sur "mourir" correspond à vivre (tableau 32). Des adolescents ont réussi à faire comprendre des expressions  au  sens  figuré que l'on a tenu à illustrer, car elles donnent vie, naturel, spontanéité à leur message, tout en prouvant leur bonne compréhension du langage quotidien, et leur désir de l'employer à leur façon. Très longues à décrypter sur le coup, elles sont plus faciles à utiliser avec le Classeur : "tourner en rond", "se monter la tête", "tomber de haut" (tableau 32), "en faire une montagne", "être en ébullition" "deviner" (tableau 22). Enfin, les sujets qui intéressent les grands, découverts à la télévision, au cours de leurs sorties, à l'écoute des conversations, figurent aussi : "inondation", "cyclone", "satellite", "pollution", etc.. (tableau 27).

 

Les images ont été adoptées par les utilisateurs, souvent après plusieurs essais de représentation. Leur choix a été fonction de leur compréhension du mot, de ce qu'il évoquait pour eux, et qui n'est pas forcément la même chose que pour nous.

 

 

 

 

 

 

 

3

 

Présentation des images :

 

Dans l'ouvrage "PRATIQUE DE LA COMMUNICATION PAR PICTOGRAMMES ET MICRO-ORDINATEUR CHEZ L'INFIRME MOTEUR D'ORIGINE CÉRÉBRALE SANS LANGAGE ARTICULÉ" de F. GICQUIAUD et V. MAILLOCHON, les images sont contenues dans 50 planches sur feuilles 21 X 29,7. Elles mesurent 3 cm 5 de large sur 4 cm 5 de haut. En noir et blanc, elles sont faciles à photocopier, agrandir ou diminuer, colorier. La signification est écrite sous chaque image.

Actuellement insérées dans l'INTERPRÈTE MULTI-CODES N°3 DE LOGICOM DIFFUSION, retouchées et coloriées en 16 couleurs. Ce nouveau logiciel permet de construire, comme sur le papier, des tableaux personnalisés à l'écran, sans limitation du nombre des cases-images. Avec un programme de dessin annexé à cet "I.M.C.3", on peut toujours créer de nouveaux symboles, ou modifier ceux existants. La désignation sur écran s'accompagne d'un retour vocal qui donne le feed back indispensable, le contrôle par l'enfant de la qualité de son message et lui permet de "se faire entendre" de tous. Une trace écrite, un courrier, sont possibles avec une imprimante. Des contacteurs doivent être étudiés, adaptés à chaque handicap.

 

Les images sont regroupées le plus possible par thèmes sur écran dans des tableaux de 30 cases. Ceux-ci sont tirés sur papier (éventuellement adhésif) par imprimante couleur (cases de 3 cm de haut sur 4 cm de large). La signification est inscrite en bas des tableaux.. Ce sont ces 33 tableaux en couleur que nous présentons.

 

Mode d'emploi :

 

Fournir un "catalogue" d'images et de pictogrammes ne suffit pas. Le rééducateur les dispose généralement dans un Classeur personnalisé, en tenant compte à la fois des thèmes et de la fréquence d'utilisation des mots et expressions.

Il y a une trame proposée pour tous à partir de laquelle on ajoute, on enlève, modifie, crée suivant les besoins, les possibilités, les demandes.

L'utilisation d'un ordinateur ne dispense pas du Classeur (Lui n'est jamais en panne). Il reste toujours à la disposition de l'enfant et des personnes qui l'entourent, il est bon d'avoir des photocopies en cas de perte, on peut le mettre facilement à jour.

4

 

L'apprentissage se fait dans le plaisir, et non comme une tâche scolaire ingrate, à partir d'une "écoute" où l'empathie joue un rôle prépondérant.

Deviner la pensée de l'enfant, la mettre en forme à partir d'images, donner un modèle momentané, permet peu à peu au jeune de s'approprier le matériel et d'avoir envie de l'utiliser spontanément. Cette communication souvent qualifiée de non verbale, exige un surcroît de parole de la part de l'interlocuteur. Il traduit mot à mot les images   montrées,   et   le   langage   mimico-gestuel,  en s'assurant de l'assentiment de l'enfant, et rétablit le message en phrase compréhensible.

Le Classeur, puis l'Ordinateur peuvent réinvestir peu à peu l'enfant dans son pouvoir de dire.

L'important est que lui, sa famille, son entourage soient fiers de ses réussites, même minimes au début, et non honteux des moyens employés. Le Classeur peut paraître désuet, mais l'Ordinateur personnel qui couronne souvent plusieurs années d'apprentissage avec l'appareil du Centre, valorise l'enfant. Il est voyant bien sûr, preuve supplémentaire du handicap, mais l'acceptation progressive de ces aides est un pas vers une certaine autonomie. Toutefois, un suivi est indispensable en Foyer d'adultes si on ne veut pas perdre les fruits d'un travail de plusieurs années et laisser retomber le jeune uniquement dans son langage mimico-gestuel, toujours insuffisant pour une communication élaborée. Une actualisation du classeur se fait avec les noms et prénoms des diverses personnes  qui entourent le jeune, un calendrier, souvent des photos, des plans. L'ordinateur de la même manière sera mis à jour pour une nouvelle vie, de nouveaux lieux.

 

© Françoise GICQUIAUD  tous droits réservés

 

NOTE : depuis cet article du 10 02 1984

les images ont été redessinées en couleur

 

 

 

 

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :